Dans leur déclaration commune : Fayulu, Matata et Mukwege tapent à côté

Martin Fayulu, candidat à la présidentielle de 2018, Augustin Matata Ponyo, Premier ministre honoraire et sénateur et le Dr Denis Mukwege, Prix Nobel de la paix, ont publié le 26 décembre 2022 une déclaration qui traduit en quelque sorte leur frustration. Nombreux sont ceux-là qui pensent que le trio s’est approprié les revendications du Front commun pour le Congo (FCC), mais qui démontrent aux yeux du monde qu’ils ne sont pas prêts pour les élections qui pointent à l’horizon. Même s’ils sont tentés de s’approprier les déboires judiciaires de Matata Ponyo, ils risqueront de passer l’essentiel de leur temps à fustiger le processus électoral, sans pour autant obtenir gain de cause. Dans ces conditions, l’alternance très attendue par le peuple risque d’être un leurre.

C’est depuis samedi 24 décembre que la CENI a lancé l’opération de révision du fichier électoral et d’enrôlement des électeurs. Une opération, comme l’a précisé le président de la CENI, Denis Kadima, va prendre un mois. Mais après le monitoring et considérant les difficultés inhérentes à tout début d’opération, il n’est pas exclu que cette opération soit prolongée de quelque temps.

C’est pendant ce temps, soit deux jours après qu’intervient la déclaration du trio Fayulu, Matata et Mukwege, qui fustigent le manque d’indépendance de la CENI et de la Cour constitutionnelle ainsi que la promulgation d’une loi électorale non-consensuelle et taillée sur mesure qui ne pourront accompagner des élections générales dignes d’une démocratie en 2023, lorsqu’il apparaît évident que le régime en place a confectionné un dispositif de fraude massive.

Comme nous l’avons dit, il s’agit des revendications du FCC que le trio s’est illégalement approprié. Et pourtant, nul n’ignore comment et dans quel contexte les juges de la Cour constitutionnelle ont été changés. De même, qui oublie aujourd’hui la procédure qui a conduit à la composition de l’actuelle équipe de la CENI ? Est-ce l’expertise de Denis Kadima qui fâche, ou bien c’est le fait qu’il soit un homme du sérail, méticuleux et qui n’accepterait pas n’importe quoi ?

Sinon, la vraie crainte des potentiels candidats, ne se situe pas au niveau du dépôt des candidatures à la présidentielle ? Parce qu’ici, ils savent bien que les choses ne se passeront plus comme par le passé. Ainsi, il ne reviendra plus à n’importe qui de présider à la destinée de la Rdc. Et même si le verrou de la CENI cédait, celui de la Cour Constitutionnelle ne laissera passer aucune impureté. C’est peut-être cet obstacle légal que les candidats expriment à leur manière.

Fayulu, Matata et Mukwege fustigent le désordre généralisé observé ce 24 décembre 2022 lors du lancement du processus d’enrôlement des électeurs. L’impréparation, le non- équipement de plusieurs centres d’inscription et l’amateurisme constatés dans le chef de plusieurs agents affectés dans ces centres préfigurent le chaos électoral qui nous attend en 2023. Dans le même contexte, le fait que le nombre de kits d’enrôlement par rapport à la population soit significativement élevé dans l’espace ‘’Grand Kasaï’’ est révélateur de l’intention manifeste de gonfler le nombre d’électeurs et donc de sièges dans cette partie du pays.

Pourtant Il n’est un secret pour personne qu’à cause de l’exode rural et d’autres raisons, cet espace géographique de notre pays se vide de ses habitants au profit d’autres provinces. Comment expliquer par exemple que la province du Kasaï Central puisse être dotée de 1432 kits d’enrôlement et celle du Nord-Kivu de 1663 kits alors que cette dernière province est deux fois plus peuplée que le Kasaï Central ?

C’est comme si le trio a une mémoire courte et oublie vite que tout début d’opération a toujours été émaillé d’incidents et de quelques problèmes techniques. Et qu’il faille attendre deux ou trois jours pour que cela se termine et que la CENI prenne la vraie allure. Comme pour dire qu’à partir de ce mardi, tout va déjà bien. D’ailleurs, il y a certains coins de la République où des cas pareils n’ont pas été constatés.

Aussi, dire que la population congolaise est en sa grande partie analphabète, n’est pas une injure, d’autant plus que bon nombre des Congolais ne savent même pas quelles sont les pièces qu’il faut amener pour être enrôlé. Ceci, c’est aussi un exercice qui prend du temps. En plus, on est dans un pays où la fourniture en électricité n’est pas toujours efficiente. Il se pourrait que des problèmes de ces genres se manifestent. Ainsi, c’est excessif de parler du désordre généralisé, comme si cette situation était entretenue par quelqu’un pour des raisons inavouées.

Régime répressif !

Dans son réquisitoire, le trio constitué de Fayulu, Matata et Mukwege alerte sur la menace qui est essentiellement le résultat d’un déficit criant de leadership et de gouvernance de la part d’un régime irresponsable et répressif. Par ailleurs, ce régime est un partenaire fiable du Rwanda et de l’Ouganda qui agressent notre pays et exploitent illégalement ses ressources naturelles. Le peuple congolais est ainsi devenu à la fois la cible et la victime de ceux à qui il avait gracieusement accordé son hospitalité.

De quoi parle-t-on ? Emettons-nous sur la même zone d’onde avec le trio ? Sinon, même des enfants comprendraient que c’est le changement de narratif intervenu en Rdc, qui est à la base de la nouvelle perception et de la compréhension de la guerre d’agression imposée à la Rdc. Désormais, la Rdc a un discours qu’il peut défendre partout et par chaque membre du Gouvernement. Et ce, contrairement au passé où le discours était ambigu. Est-ce ça le manque de leadership ? Qu’à cela ne tienne, la prise de position du trio traduit un point de non-retour, la volonté inavouée d’évoluer à contre-courant de l’union sacrée de la nation.

Dans les mêmes conditions, comment critiquer l’état de siège, si on n’est pas de mèche avec les agresseurs ? Et pourtant, l’on apprend que les recettes fiscales qui échappaient au Trésor public se sont accrues et sont canalisées ; des points de ravitaillement en minerais ont été coupés ; nombreux sont les terroristes qui ont été anéantis et la population sécurisée. C’est dans l’objectif de tirer les leçons de cette situation qu’un atelier d’évaluation est prévu !

Du monitoring du processus électoral

Dans leur déclaration, Martin Fayulu, Matata Ponyo et Denis Mukwege sollicitent auprès de la Communauté internationale, l’envoi urgent des experts des Nations-Unies, de l’Union européenne et de l’Union africaine pour procéder au monitoring du processus tel que mené à ce jour. C’est comme si le trio voudrait encore plonger la Rdc dans la situation d’un pays assisté. Et pourtant, depuis les élections de 2018, le pays a pris la décision de financer ses élections, quoi que couteuses, sur ressources propres.

Dans ce sens, que viendrait faire les impérialistes chez nous, comme si dans leur pays la Rdc pourrait se permettre d’envoyer des experts pour monitorer leurs processus électoraux ? De quoi le trio a-t-il peur ? Sinon, il transparait que le trio ne fait pas confiance à la CENI et se met dans la position de refus de tout résultat qui sortirait de la CENI. Même si le trio avait peur, il ne lui est pas permis de plonger la Rdc dans la phobie électorale. Et ce, pendant que le moment est indiqué pour mobiliser leurs militants à se faire enrôler.

Des propositions discutables du trio

S’agissant de l’agression de la Rd Congo par le Rwanda au travers de ses supplétifs de M23, Fayulu, Matata et Mukwege ont fait des propositions soutenables, mais discutables. C’est ainsi qu’ils exigent la condamnation ferme du Rwanda par le Conseil de sécurité et par tous les pays épris de paix et de justice pour cet acte d’agression contre la RDC, en violation de la Charte des Nations-Unies; le retrait immédiat des éléments du M23 de toutes les positions qu’ils occupent (ici, le trio doit se référer à la feuille de route de Luanda qui est clair quant à ce); le déplacement loin de la RDC des éléments rwandais des FDLR et Ougandais des ADF par l’ONU (la Rdc n’héberge plus des FDLR sur son sol).

Nombreux ont été renvoyés chez eux au Rwanda. Quant aux ADF, ce sont des terroristes qui sont en train d’être combattus, et qu’on ne peut pas rapatrier); le retour des 6 millions de déplacés internes congolais dans leurs territoires grâce à un programme que l’ONU devra mettre en place (ce retour exige que la paix se sont consolidée et qu’il n’y a plus de bruits de bottes); La rupture des relations diplomatiques avec le Rwanda et la fermeture de toutes les frontières avec ce pays (l’ambassadeur rwandais a été chassé de Kinshasa et il est difficile de fermer toutes les frontières); le changement de mandat de la MONUSCO et de sa Brigade d’intervention pour octroyer aux forces de l’ONU tous les moyens nécessaires pour rétablir la paix en RDC.

En ce qui concerne l’insécurité à Kwamouth, à Wamba (Bagata) et dans les environs de Kinshasa, nous exigeons une enquête internationale neutre pour connaître les contours et les auteurs des tueries barbares qui s’y déroulent de sorte qu’ils répondent de leurs actes devant les Tribunaux. Nous demandons en plus à la Police et à l’Armée nationales de sécuriser les citoyens, leurs biens et tous les villages affectés par ces massacres.

L’Avenir

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